Ma passion des champignons ne date pas d’hier !
Ramasser les champignons est avant tout une histoire de famille. Sans cette transmission familiale, il est fort probable que je n’aurais jamais eu l’occasion de mettre les pieds dans une forêt.
Habitant dans ma prime jeunesse en pleine zone industrielle, au milieu des hauts-fourneaux de l’est de la France, avec pour terrain de jeu de notre bande de gosses, les bâtiments en construction et les friches de la Z.U.P, sans un grand-père originaire des campagnes du centre de la France, venu « travailler à l’usine », notre famille n’aurait jamais eu l’idée de prendre la voiture pour s’en éloigner à la recherche d’un peu d’air pur et de champignons, dans des zones plus rurales.
Et à cette époque là, dans les années 70, pendant les fameuses « trente glorieuses », le dépaysement était garanti. Alors que là où j’habitais, la météo nous était indiquée par le vent transportant l’odeur plus ou moins nauséabonde d’œuf pourri dégagée par les usines sidérurgiques, que je m’endormais avec en bruit de fond, les lamineurs et autres engins qui résonnaient dans ces vallées industrielles lorraines, dès que nous prenions la voiture, j’en prenais plein les yeux.
Des pâtures verdoyantes qui contrastaient avec les murs noircis et salis par l’industrie, la voiture bloquée par les vaches sur la route, conduites à l’étable pour la traie, les tas de fumier devant les fermes et les forêts…
Ah les forêts ! La forte odeur d’humus qui remplissait mes narines à peine arrivé. Les capricornes qui venaient taper violemment le pare-brise de la voiture le soir quand nous repartions. Les gros troncs d’arbre laissés au bord de la route sur lesquels je m’empressais de monter. Une forêt avec un sous-bois, souvent constitué de noisetiers. Noisettes que l’on s’empressait de casser entre les dents pour les déguster. Des arbres à la taille impressionnante que l’on s’amusait à entourer en se donnant la main dans une sorte de ronde pour en mesurer la circonférence. Pas ou peu de chemins forestiers, il s’agissait essentiellement de chemins boueux destinés au tracteur du bûcheron pour aller prélever un ou deux exemplaires d’arbres de bel taille. A chaque visite je m’empressais de visiter les mares ou les fossés à la découverte des salamandres dont les couleurs jaune et noir me fascinaient. Inutile de vous préciser que je ne retrouve plus ces sensations de nos jours, les forêts ont été largement dénaturées par une exploitation intensive et peu raisonnée.
Et les champignons dans tout ça … Comme tous les gosses, je m’empressais d’exploser les gros lactaires blancs à coup de bâton taillé dans un jeune noisetier ou à coup de botte. Et j’adorais cavaler partout afin de remplir mon cageot de « jaunettes » (girolles) plus vite que les autres et j’étais fier de montrer le résultat de ma récolte aux autres… Pas de GPS ou de carte à cette époque, on restait en contact en s’appelant ou en sifflant régulièrement et évidemment je me souviens que l’on s’est perdu plus d’une fois, déboulant à force de marcher sur une petite route, ne sachant pas dans quel sens aller pour retrouver la voiture.
Plaisir simple de la cueillette qui ne m’a jamais quitté depuis. Et puis il y avait ces soirées où toute la famille étaient réunie pour nettoyer les champignons versés en tas au milieu de la table de la cuisine, avant de les blanchir puis de les mettre en bocaux et les stériliser dans la grande lessiveuse.
Non cette passion ne m’a jamais quitté et ne me quittera probablement jamais, mélange de fascination, de nostalgie et de moments de bonheur.
Et vous, quand est-ce-que ça vous a pris ?