Quelles seront les conséquences de cet hiver sur la pousse des morilles ?
Voilà un vaste sujet. La saison des morilles dépend des conditions climatiques automnales, hivernales et printanières. Si un seul de ces paramètres ne correspond pas aux attentes de nos chers ascomycètes, la quantité et la qualité des pousses en est affectée.
L’exemple typique ici est la saison 2014 : automne quasi-caniculaire, hiver doux presque sans neige, printemps sec, avec un mois de mars placé sous un anti-cyclone nous enfermant sous une couche de nuages bas. Au final, nous sommes resté près d’un mois sans la moindre goutte de pluie, sous un ciel gris avec un temps frais empêchant le réchauffement du sol, sécheresse aggravée par une bise persistante.
Conséquences de ces conditions climatiques : aucune morille et quasiment aucun ascomycète printanier à observer. La seule rencontre que je ferai dans les Vosges saônoises en 2014 seront des pézizes d’Auvergne. Maigre consolation et maigre récolte… Seul le Haut-Doubs calcaire viendra sauver une saison bien terne. Du jamais vu en ce qui me concerne.
En 2011 et 2013, automne à peu près dans les normes habituelles ici, hiver froid, neige, les morilles sont là. Mais en avril, des températures exceptionnellement et soudainement chaudes les font sécher sur place et la pousse stoppe ainsi prématurément.
2012, mêmes conditions. Je vois déjà le même résultat que la saison 2011 se profiler. Et là, coup de chance extraordinaire, retour d’un temps plus frais et pluvieux. La saison est extraordinaire. Ma meilleure saison dans les Vosges saônoises jusqu’à présent.
Et 2015 alors ? L’automne 2014 a été particulier, temps chaud et sec après un période automnale en plein été, puis des conditions automnales qui ont perduré jusqu’à la fin du mois de décembre. A ce moment là, l’hiver est arrivé d’un coup avec des froids extrêmes (-15°C la nuit) et avec la neige dans la foulée. L’hiver a été court, froid mais sans plus, nous n’avons pas connu les conditions habituelles de gelées fortes nocturne et diurnes. Nous avons connu une succession d’épisodes neigeux suivi de redoux. Au final, 25 cm maximum de neige en plaine, 60 cm environ vers 800 m, 1m30 à 1m40 vers 1100m.
C’est plus qu’en 2014 où l’hiver avait été inexistant et particulièrement doux, pour ne pas dire anormalement chaud et c’est moins qu’un hiver habituel, où les périodes de gel sont plus intenses et la neige un peu plus présente, jusqu’à 50 cm en fond de vallée ici et jusqu’à 3 mètres vers 1200 m comme en 2006.
Difficile de se faire une opinion et pronostiquer une bonne ou mauvaise saison de morille. Je reste optimiste en pensant que ce semblant d’hiver devrait suffire à poser les bonnes bases et satisfaire leurs conditions de pousse, même si on est loin des hivers d’antan et j’appréhende ce mois particulier qu’est mars. Il faut à la fois des conditions anticycloniques pour que le soleil réussisse à réchauffer fortement le sol non calcaire des Vosges saônoises et de la pluie pour entretenir une certaine humidité au sol. Tout est question de dosage et d’équilibre qui semble bien précaire…
Au moins la végétation ne semble pas désorientée comme en 2014, les jonquilles pointent tranquillement sous la neige, les perce-neige portent bien leur nom.
Déjà mes contacts me font part de leur premières découvertes. On assiste à la traditionnelle remontée de pousse. Dans le sud, on réalise ses premières cueillettes, puis la pousse formera une langue qui remontera jusqu’au bassin parisien et atteindra le nord avant de s’étaler vers l’est et l’ouest. En attendant que la pousse atteigne mes secteurs, je consulte mes archives et je tombe sur certaines perles, comme cette prospection en 2013, une sortie « mi-cologique, mi-cophage », où on s’était lancé le défi de parcourir un secteur particulier à la recherche de toutes les espèces de morilles que l’on pouvait trouver afin de nous familiariser avec les déterminations proposées par Philippe Clowez et qui nous avait comblés au delà de nos espérances intellectuellement et culinairement…
A ce propos, vous pourrez retrouver un article intéressant sur les morilles de Gérard Houdou, journaliste, photographe et auteur de plusieurs livres de vulgarisation sur les champignons, dans le prochain numéro du Chasseur français d’avril, à paraître fin mars. Histoire de vous faire patienter et rêver encore un peu si vous êtes dans un région où la saison débute plus tardivement…
Comme beaucoup, je trouve cette période interminable et je trépigne déjà. Qu’il est difficile de résister à la tentation de parcourir ses places en vain…